Visites guidées
21 juin 2019
Voyager comme un designer : Tendance bleu marine
Lisez la chronique de Corinne Cécilia, directrice déléguée chez Maison & Demeure.
Avec les beaux jours reviennent les joies du plein air, et beaucoup de citadins s’installent au bord de l’eau en fin de semaine ou pendant les vacances. Des provinces maritimes à la côte pacifique, le Canada offre une multitude de lacs, de fleuves et de rivages qui ont modelé nos loisirs, mais aussi notre histoire. Au XVe siècle déjà, et bien avant les expéditions officielles, les pêcheurs français fréquentaient nos côtes à la faveur de puissants courants océaniques. Les marins sont à la fête cet été et, de Saint-Pierre-et-Miquelon à Saint-Jean-Port-Joli, on célèbre la bravoure des matelots dont l’univers inspire le style estival — de la mode à la déco fluviale. La plaisance nous permet aussi de réaliser à quel point nos ressources en eau sont précieuses et combien il est urgent de les protéger.
Chaque année, que ce soit lors de la Journée mondiale des océans (le 8 juin) ou de la Journée européenne de la mer (le 20 juin), on souligne le rôle essentiel de la mer pour la planète et pour notre survie. Depuis plus de 20 ans, les scientifiques constatent que la biodiversité marine disparaît, ce qui engendre de l’insécurité alimentaire en plus des déséquilibres climatiques et économiques. On sait ce qui fragilise les océans — principalement la surpêche et la pollution — et ce que nous devons faire pour mieux gérer nos ressources halieutiques. Mais, faut-il le rappeler, chaque personne a le pouvoir de sauver les océans un geste à la fois : en consommant des produits locaux, en achetant du poisson provenant de sources durables, en réduisant son « empreinte plastique », en privilégiant les lessives biodégradables. Ou encore en soutenant les organismes qui œuvrent à créer des zones marines protégées telles que Mission Blue, une initiative pilotée par la célèbre biologiste Sylvia Earle.
La gestion durable de nos ressources en eau dépend aussi des progrès faits dans l’habitat. L’immobilier est une occasion d’innover et de mettre en œuvre des solutions écologiques de pointe, comme en témoigne l’effervescence du secteur. À Québec par exemple, dans l’écoquartier de la Pointe-aux-Lièvres axé sur le développement durable, des écopropriétés sont en chantier qui misent sur « l’union de l’espace individuel et commun, de la ville et de la nature, de la durabilité et de l’esthétisme ». Après le salon « Energy Solutions Made in Germany » qui vient de présenter aux professionnels des technologies en matière d’efficacité énergétique en construction, la Chambre canadienne allemande de l’industrie et du commerce proposera en septembre une mission commerciale « Énergies renouvelables dans les bâtiments »
Les technologies vertes bénéficient sans doute de l’expansion rapide du marché canadien de l’investissement responsable (IR), comme on a pu le constater lors de la Conférence 2016 de l’Association pour l’investissement responsable (AIR) qui vient de se dérouler à Toronto. L’IR fait référence à l’intégration des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance d’entreprise dans la sélection et la gestion des investissements. Fer de lance dans ce domaine, l’AIR propose des formations et des recherches de pointe, ainsi qu’une conférence annuelle attirant des experts du monde entier. L’organisme vient d’ailleurs de publier Les Milléniums, les femmes et l’avenir de l’investissement responsable, un rapport qui étudie les points de vue de la génération Y (ou les « Milléniums ») et des femmes en matière d’investissement responsable (IR) et pose trois constats majeurs : « Les investisseurs de la génération Y montrent un intérêt beaucoup plus élevé envers l’investissement responsable et d’impact que les générations précédentes ; les Milléniums considèrent que la gestion des risques et des possibilités ESG est essentielle au rendement à long terme de leur portefeuille ; et les investisseuses pourraient être plus ouvertes à l’IR que les investisseurs, ce qui représente une occasion d’éducation pour les conseillers en IR et les sociétés de fonds d’IR ».
Un nombre croissant d’entreprises citoyennes adhèrent à la notion de responsabilité, et l’on se félicite de progrès remarquables dans le secteur du design et de la décoration. L’occasion de découvrir les collections de Villeroy & Boch, une entreprise familiale qui, depuis 1748, crée de la vaisselle d’exception en porcelaine et en céramique. Ce fabricant allemand intègre les défis environnementaux directement à la stratégie et au processus de design, et s’engage sur le plan local et international pour une meilleure gestion de l’eau. Dans la lignée de l’Autrichien Victor Papanek qui, en 1969 déjà (!), prônait un design responsable avec l’ouvrage « Design for the Real World : Human Ecology and Social Change », des créateurs adoptent une approche résolument durable : récupération, éco-efficacité ou usage de techniques artisanales, le Slow Design progresse lentement mais sûrement… À ce titre, on se peut se réjouir de la vitalité du compagnonnage français, une tradition inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’humanité parce qu’elle transmet « des savoirs et des identités par le métier ». Au Canada, les Compagnons du Devoir offrent ainsi des rencontres entre de jeunes artisans. Selon Gilles Brethoux, qui encadre les jeunes sur place, « le compagnonnage est un mouvement qui se caractérise par sa transmission de la connaissance et de l’ouverture. Notre approche permet à chacun de grandir dans et par le métier. La plus grande richesse, c’est la rencontre qui nous l’apporte, surtout quand le sens est noble, tel un métier ». Une tradition qui nous donne accès au réseau des meilleurs artisans !
Il est désormais admis que changer nos habitudes consommatoires, notamment en matière d’alimentation, peut engendrer des progrès. L’engouement actuel pour les conserves maison témoigne sans doute du besoin de renouer avec la nature et des aliments de qualité… tout comme le retour à la terre que choisissent des citadins en quête d’une vie plus simple. Des organismes citoyens appuient ce mouvement. Ainsi, Prenons le maquis « propose des outils pour reconstruire un rapport sain et responsable à l’existence ». Formations, livres, matériel de survie et plus… C’est une belle initiative à découvrir. On peut aussi privilégier les acteurs économiques qui s’engagent pour la protection des ressources halieutiques. Saluons donc le partenariat entre Relais & Châteaux (une association de 540 hôtels et tables d’exception) et Seaweb Europe, une organisation environnementale qui œuvre pour la préservation des océans et de leurs ressources en tenant compte de la santé des espèces à long terme. Olivier Roellinger, vice-président Relais & Châteaux, déclare que « la mer est un garde-manger extraordinaire, où rien n’est perdu, mais il ne faut pas le gaspiller, l’anéantir. Il est insupportable de se dire que les générations à venir ne pourront plus se nourrir de la mer ».
Enfin, la pause de l’été, c’est aussi l’occasion de savourer des livres qui nous inspirent ou nous dépaysent… Si, comme moi, vous ne pouvez résister à l’appel de l’océan, vous aimerez sans doute ce charmant livre paru aux Éditions de Saxe : Déco d’inspiration marine, d’Anna Örnberg. Destiné aux amoureux de la mer et des loisirs créatifs, cet ouvrage coloré propose des idées de bricolage, de couture créative et de décoration pour insuffler à vos décors un style « bord de mer ». On apprécie particulièrement les conseils de l’auteure pour recycler du vieux linge ou transformer des meubles de récupération. Pour d’autres suggestions de lecture, rejoignez mon « Coin lecture » dans le numéro d’été du magazine Maison & Demeure. D’ici là, je vous laisse avec ces vers immortels de Charles Baudelaire :
Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame…
Save
1 et 2. Corinne Cécilia 3. Chambre canadienne allemande de l’industrie et du commerce 4. Mission Blue 5. Villeroy & Boch 6. Éditions Ouest-France 7. Éditions de Saxe
Reproduction de l’article paru le 21 juin 2015 à l'origine.