Décoration et design
La maison mitoyenne de Francesca Connolly
Publié le 16 janvier 2017

Quels plafonds ! Quelles boiseries ! La maison mitoyenne est la tendance du moment, emplissant les revues, Pinterest et le grand écran de décors de rêve. Certaines demeures font l’unanimité, nourrissant les envies de design. La génération précédente rêvait de belles clôtures blanches en banlieue, puis de maisons de campagne bien équipées (merci, Martha !). Ensuite sont venus les lofts urbains en brique rouge avec poutres rustiques. Aujourd’hui, le monde du design se tourne vers les moulures majestueuses et les plafonds stratosphériques des brownstones de New York. Ces maisons en rangée ont tous les atouts, y compris la grande ville devant leurs portes parfaitement symétriques. Les exemples paradisiaques ne manquent pas. Pinterest regorge de photos de demeures de célébrités. Mais c’est une star d’un autre type qui incarne vraiment cette nouvelle tendance : Francesca Connolly, blogueuse devenue célèbre dans le monde du design, cofondatrice du réputé site Remodelista et aujourd’hui une voix influente. Sa maison des années 1870 illustre son style épuré et original, et reflète la simplicité du nouveau courant qui a tout balayé : association parfaite entre éblouissement et sobriété, look soigné et inachevé, vintage et
moderne. Suivez le guide.

Ayant acheté avec son mari une propriété située dans Brooklyn Heights il y a 19 ans, Francesca a converti en duplex les neuf logements « cages à poules ». Quelques années plus tard, l’édifice, redevenu maison unifamiliale, a retrouvé son lustre d’antan. Avec ses 8 mètres de large, c’est l’une des plus belles propriétés de New York et l’une des plus convoitées. Il existe véritablement un art de vivre associé à la brownstone, et Francesca le maîtrise parfaitement. À l’intérieur, un lustre tout en courbes d’Alvar Aalto rappelle la forme de la porte. Un banc vintage recouvert de mohair, un grand miroir et une console flottante adoucissent les lignes épurées.

D’où vient le nom brownstone ? Si beaucoup utilisent ce terme pour parler des maisons en rangée new- yorkaises, il s’agit en fait de maisons mitoyennes en brique aux façades de grès brun, provenant généralement des carrières de Portland, au Connecticut. C’est le romantisme qui a remis à la mode les matériaux sombres, mettant fin au règne du granit, du marbre et du calcaire. Ainsi, dès 1860, les brownstones ont transformé les rues de New York. Les immenses portes d’entrée cintrées, typiques des maisons new-yorkaises en rangée de la seconde moitié du XIXe siècle, éblouissent dès le premier coup d’œil. Francesca a confié les dernières rénovations à l’architecte Steven Harris. Avec son partenaire, le designer Lucien Rees Roberts, il a restauré et modernisé la maison de cinq étages, allant jusqu’à recréer le perron d’origine d’après une photo des années 30.

Les propriétaires qui ont la chance d’habiter dans une brownstone où les cheminées sont d’origine, et qui ont les moyens de les restaurer quand elles ont été repeintes ou endommagées, disposent d’un atout royal. Dans le salon avant (typique de ces demeures), la cheminée d’origine en marbre sculpté s’harmonise à un lustre (accessoire vintage de Broadway), créant un décor classique de salle de réception. Contrepoint à cette splendeur, le mobilier bas et confortable réchau e l’atmosphère, comme le canapé recouvert de mohair, et invite à s’installer au salon pour lire ou somnoler dans la lumière de l’après-midi.

La brownstone de Francesca peut s’enorgueillir de six cheminées d’origine. Elle y expose élégamment des tableaux et des bibelots subtilement choisis. Des livres sont empilés dans la somptueuse cheminée en marbre d’une chambre du deuxième étage. Une cheminée en bois sculpté contraste joliment avec le mobilier moderne de la salle à manger. Finalement, un tableau du grand-père de Francesca orne la cheminée en marbre de la chambre principale, tel qu’on peut le voir ici.

Il peut sembler étonnant de voir une cuisine si étroite dans une maison si grande, mais son installation au même étage que le salon était nécessaire pour qu’elle joue pleinement son rôle central. Lorsque la demeure a été construite, la cuisine devait être au niveau du jardin. « Mais on passait alors l’essentiel de la journée à l’étage le moins lumineux », dit Francesca, expliquant sa décision de la relocaliser à la place de l’ancien garde-manger. Les élégantes armoires en Corian, les comptoirs en marbre Statuario et les murs bordés de carrelage en marbre Thassos créent un look résolument moderne. Les planchers et la paroi de verre plombée donnant sur la terrasse viennent réchau er cet océan de blanc zen immaculé.

Même les plus fervents minimalistes succombent aux moulures en plâtre d’origine d’une brownstone. Lorsque l’architecture d’une pièce est aussi ra née, nul besoin de meubles abondants ou recherchés. Steven et Lucien se sont inspirés des imposantes corniches et moulures d’origine, mais les ont simplifiées pour les boiseries qu’ils ont ajoutées afin d’épurer les lignes. Le style industriel des fenêtres et de la porte de la salle à manger, remplacées lors de rénovations antérieures, forme un contraste saisissant avec les détails historiques.

Dans le hall, les murs d’un blanc éclatant font ressortir les magnifiques lambris et la rampe sculptée. Par chance, les boiseries d’origine avaient été conservées lors de la transformation de la demeure en neuf appartements. On en a un aperçu à partir du salon avant et de la cuisine, Steven ayant ouvert l’espace pour créer un décor léger et aéré, mais préservant le cachet historique. Autrefois, des portes en bois coulissantes séparaient probablement le salon avant de la salle à manger.

L’engouement pour les brownstones s’explique en partie par la hauteur des plafonds. Bien que Steven les ait limités à 4,25 m de hauteur, un simple changement d’ampoule devient toute une aventure, même aux étages supérieurs. Grâce à la méridienne en velours près de la cheminée et aux murs bleu pâle (60 % de Blanc de Saturne 1632 et 40 % de Blanc nébuleux OC-130 de Benjamin Moore), la chambre principale reste cependant douillette.

Si les brownstones sont recherchées pour les tournages et les photos de mode, c’est parce que la lumière naturelle est l’atout le plus flatteur d’une maison. Ici, on a une grande baie vitrée. Les fenêtres, assez larges pour que les persiennes disparaissent dans l’encadrement, inondent les pièces de lumière. Dans l’une des petites chambres, le lit plateforme est assez bas pour dégager complètement la vue.

Des éléments modernes donnent un look tendance à une structure élégante. Le résultat : une maison qui ne se contente pas d’imiter le style d’une époque, mais la réinterprète. La luxueuse salle de bain principale en est une illustration. Agrandie pour occuper une pièce supplémentaire, elle est assez vaste pour accueillir une large douche en verre. Un cadre en métal o re un look personnalisé et les panneaux de verre laissent entrer la lumière naturelle. Les murs sont recouverts de marbre blanc Thassos tandis que le sol est carrelé de marbre Statuario, plus veiné.
Matthew Williams/ Photofoyer
Maison & Demeure mars 2016